Débats du Sénat (Hansard)
1re Session, 45e Législature
Volume 154, Numéro 20
Le mercredi 1er octobre 2025
L’honorable René Cormier, Président intérimaire
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- L’ajournement
- Projet de loi modifiant la Charte canadienne des droits des victimes et établissant un cadre de mise en œuvre des droits des victimes d’actes criminels
- Affaires juridiques et constitutionnelles
- Affaires sociales, sciences et technologie
- Banques, commerce et économie
- Pêches et océans
- Sécurité nationale, défense et anciens combattants
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- Les finances
- L’innovation, les sciences et le développement économique
- Les relations Couronne-Autochtones
- La sécurité publique
- L’environnement et le changement climatique
- Les finances
- Le Bureau du Conseil privé
- Les affaires mondiales
- Les relations Couronne-Autochtones
- Le Bureau du Conseil privé
- Le patrimoine canadien
- ORDRE DU JOUR
LE SÉNAT
Le mercredi 1er octobre 2025
La séance est ouverte à 14 heures, le Président intérimaire étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
Les travaux du Sénat
Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, vous aurez remarqué que la sonnerie n’a pas retenti. Le problème sera réglé et, si vous êtes d’accord, nous poursuivrons nos délibérations. Est-ce d’accord, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
Le Mois de la sensibilisation à l’autisme
L’honorable Leo Housakos (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour souligner le Mois de la sensibilisation à l’autisme. Chaque année, c’est l’occasion pour nous de réfléchir aux expériences des Canadiens autistes, aux réalités vécues par leur famille et leurs aidants, ainsi qu’à notre responsabilité comme législateurs de favoriser une société plus inclusive et réceptive.
Pour bon nombre de sénateurs et de Canadiens, ce n’est pas une nouvelle conversation. Elle s’inscrit dans un effort continu, façonné par des années de lutte, de travail communautaire et d’écoute attentive des personnes aux prises avec cette réalité au quotidien.
Tout d’abord, chers collègues, je tiens à préciser que l’autisme n’est pas une déficience ni un fardeau. Il fait partie intégrante de la diversité humaine dans toute sa complexité, ses nuances et ses aspects souvent mal compris. Partout au pays, les Canadiens neurodivergents apportent une contribution dont les institutions et le reste de la population commencent seulement à prendre conscience.
Je m’en suis récemment souvenu lors d’une conversation avec un jeune homme nommé Drew, qui m’a très gentiment invité à participer à son balado. Ses questions réfléchies m’ont incité à écouter plus attentivement. Une fois de plus, cela m’a rappelé que les Canadiens neurodivergents sont des créateurs, des penseurs et des innovateurs. Ils voient le monde différemment, et cette différence n’est pas seulement précieuse, mais aussi essentielle.
Bien sûr, il s’agit rarement d’une réussite individuelle. Bon nombre de ces personnes ont la chance de s’épanouir grâce aux efforts inlassables de leur famille, de leurs aidants, de leurs éducateurs et de leurs défenseurs, dont la plupart n’ont jamais cherché à être reconnus, mais seulement à assurer l’équité. Ils assument des responsabilités extraordinaires, souvent sans soutien adéquat, et ils le font avec une dignité incroyable.
À Montréal, où j’habite, j’ai eu le privilège de voir de mes propres yeux le travail remarquable accompli par À pas de géant, un organisme qui cultive les talents des personnes autistes et démontre l’efficacité d’un soutien personnalisé.
Chers collègues, au Sénat, nous avons le devoir de faire plus que de simplement admirer leurs efforts. Nous devons leur répondre avec détermination.
En 2023, le Parlement a adopté le projet de loi S-203, que j’ai été fier de présenter et qui a reçu la sanction royale avec le soutien unanime des deux Chambres. Ce projet de loi prévoyait la création d’un cadre national pour l’autisme au Canada, une feuille de route pratique visant à combler les lacunes en matière de diagnostic, d’éducation, d’emploi et de soins de longue durée pour les Canadiens autistes. Il ne comportait rien de controversé. Il fait simplement appel au bon sens. De nombreux sénateurs, dont le sénateur Boehm et bien d’autres, ont contribué à son élaboration.
Il est honteux que, plus de deux ans plus tard, le gouvernement n’ait pas rempli son obligation fondamentale de le mettre en œuvre. Vous conviendrez avec moi, chers collègues, qu’un cadre qu’on laisse moisir dans un tiroir n’est pas un cadre, mais une promesse rompue.
Les Canadiens autistes et leur famille n’ont pas besoin de plus de consultations. Ils n’ont pas besoin d’autres engagements vagues. Ils ont besoin de leadership. Ils ont besoin d’un accès à des services, peu importe où ils vivent au pays. Ils ont besoin qu’on reconnaisse que l’inclusion n’est pas une case à cocher, mais une norme à respecter.
Ce mois d’octobre, alors que nous soulignons le Mois de la sensibilisation à l’autisme, j’exhorte le gouvernement Carney à faire ce que son prédécesseur n’a pas fait, c’est-à-dire aller au-delà des gestes symboliques. Faisons honneur aux Canadiens neurodivergents non seulement dans nos paroles, mais aussi dans nos politiques. Faisons le travail que nous nous étions engagés à faire.
Parce que la sensibilisation, ce n’est que le début. Maintenant, il faut des mesures concrètes.
Merci, chers collègues.
Des voix : Bravo!
La Journée nationale de la vérité et de la réconciliation
L’honorable Brian Francis : Honorables sénateurs, hier, nous avons célébré la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, qui nous donne chaque année l’occasion de rendre hommage à tous les enfants qui sont morts ou qui ont disparu dans les pensionnats et les sites connexes, ainsi qu’à ceux qui continuent à composer avec les traumatismes intergénérationnels qui en découlent.
Chers collègues, le 30 septembre n’est pas seulement une date sur le calendrier : c’est un appel à tendre l’oreille, à apprendre et à agir. J’espère que vous avez pris quelques instants lors de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation ou aux alentours de celle-ci pour examiner en profondeur notre passé et notre présent communs, notamment en participant à des activités éducatives et commémoratives.
Dimanche dernier, je me suis joint aux sénatrices Boyer et White au Sénat pour rendre hommage à neuf remarquables membres des Premières Nations, des Inuits et des Métis qui ont été mis en nomination par le Centre national pour la vérité et la réconciliation et qui ont reçu la Médaille du couronnement du Roi Charles III. Il s’agit de Dorene Bernard, de Jacquie Bouvier, de Levinia Brown, d’Edna Elias, Richard Ejinagosi Kistabish, de Laurie McDonald, de Brian Normand, de Dennis Saddleman et de Cynthia Wesley-Esquimaux.
Cette prestigieuse distinction constitue un hommage tout à fait approprié au travail que ce groupe a accompli et continue d’accomplir pour faire progresser la réconciliation au Canada.
Sans la force, le courage et la détermination inébranlables des survivants et des survivants intergénérationnels comme eux, le Canada n’aurait pas conclu la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, mis sur pied la Commission de vérité et réconciliation, créé le Centre national pour la vérité et la réconciliation ou célébré la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, et je suis extrêmement fier d’avoir contribué à l’instauration de cette dernière en 2021.
Chers collègues, en ce dixième anniversaire du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation, le 30 septembre est aussi un moment important de réflexion nationale sur les progrès réalisés et le travail qu’il reste à accomplir.
Le Canada n’a pas encore donné suite de façon significative à la plupart des 94 appels à l’action; il doit résister aux pressions concurrentes à l’intérieur et à l’extérieur du pays et accorder une attention renouvelée à la recherche de la vérité en vue d’une réconciliation durable.
Wela’lin, meegwetch, merci.
Le Mois du patrimoine coréen
L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour célébrer le deuxième Mois du patrimoine coréen au Canada. Je tiens à remercier les marraines, les sénatrices Amina Gerba et Rebecca Patterson et le parrain, le sénateur Hassan Yussuff, ainsi que tous les honorables sénateurs pour avoir adopté à l’unanimité notre motion au Sénat le 4 juin 2024. Le mois d’octobre 2024 avait marqué le lancement officiel du Mois du patrimoine coréen au Canada.
(1410)
Nous nous rassemblerons de nouveau cette année dans le cadre de cette reconnaissance importante pour la deuxième cérémonie annuelle de lever du drapeau à l’occasion du Jour de la Corée sur la Colline du Parlement, qui aura lieu mercredi prochain, le 8 octobre, à 12 h 30. Elle sera suivie d’une réception en soirée consacrée à la cuisine et à la culture coréennes à l’édifice Sir-John-A.-Macdonald. J’invite tous les honorables sénateurs à assister aux deux événements.
Le mois d’octobre revêt également une grande importance culturelle et historique pour la communauté canado-coréenne. Le 3 octobre est le Gaecheonjeol, ou jour de la fondation, qui célèbre les origines et les milliers d’années d’histoire de la Corée. Le 6 octobre sera le Chuseok, ou l’Action de grâces coréenne, l’une des traditions familiales les plus importantes en Corée, au Canada et dans le monde entier.
Il est tout à fait approprié que ce patrimoine profondément enraciné soit honoré au cours d’un mois où nous réfléchissons également à l’évolution et à la dynamique des relations entre le Canada et la Corée. Cette année, nous célébrons deux événements qui ont marqué ces relations. Tout d’abord, nous commémorons le 75e anniversaire de la guerre de Corée, une occasion d’honorer le courage et le sacrifice de tous ceux qui ont combattu pendant cette guerre. Deuxièmement, nous célébrons le 10e anniversaire de l’Accord de libre-échange Canada-Corée, un accord historique qui a non seulement renforcé nos liens économiques, mais qui a aussi approfondi nos relations sur le plan de la culture et de l’éducation, ainsi que les rapports interpersonnels. Ce qui a commencé comme un accord commercial s’est transformé en un partenariat stratégique global qui incarne le respect mutuel, la prospérité partagée et les échanges culturels.
Partout dans le monde, la diaspora coréenne s’épanouie. Le Canada compte une population canado-coréenne dynamique, diversifiée et en croissance. Les contributions de cette communauté sont exceptionnelles dans nombre de secteurs, des affaires à la technologie en passant par le milieu universitaire, les arts, la culture et le service public. Les entrepreneurs, les créateurs et les dirigeants canado-coréens continuent de contribuer à façonner l’avenir du pays, à stimuler l’innovation, à renforcer les collectivités et à renforcer notre identité nationale.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en tant que fière fille de la Corée et du Canada. C’est avec humilité que je célèbre la communauté qui m’a élevée, qui m’a façonnée et qui continue de m’inspirer. Je vous souhaite donc un joyeux Mois du patrimoine coréen.
Des voix : Bravo!
Le Mois de la sensibilisation à l’autisme
L’honorable Peter M. Boehm : Honorables sénateurs, comme nous l’avons entendu, octobre est le mois de la sensibilisation aux troubles du spectre de l’autisme au Canada.
Pour les personnes autistes et neurodivergentes, leur famille et les aidants, l’autisme est au centre de leurs préoccupations à chaque instant. Je le sais, car j’ai un fils autiste.
Je prends la parole aujourd’hui en réponse à la nouvelle vague alarmante de mésinformation et de désinformation au sujet des troubles du spectre de l’autisme, ou TSA, qui déferle non seulement dans l’environnement toxique qui caractérise de plus en plus les réseaux sociaux, mais aussi par l’intermédiaire de commentaires non éclairés aux plus hauts échelons politiques au sud de la frontière.
C’est comme si une publication paternaliste sur les réseaux sociaux avait vu le jour pour remplir une promesse politique, c’est-à-dire trouver une cause et un remède à l’autisme dans un délai de six mois.
Des déclarations simplistes qui sous-entendent une certitude là où il n’y en a pas peuvent mener à l’incompréhension, à un sentiment de culpabilité, à la stigmatisation et à l’anxiété chez les personnes autistes et leurs proches.
Selon de nombreuses associations médicales et de nombreux scientifiques du monde entier, le médicament analgésique Tylenol et son ingrédient actif, l’acétaminophène — présent également dans d’autres médicaments — ne causent pas l’autisme et, en fait, ils demeurent l’option la plus sûre pour traiter la fièvre et la douleur pendant la grossesse.
De multiples études à plus grande échelle de même que des revues systématiques n’ont pas permis d’établir de lien de causalité entre l’exposition prénatale à l’acétaminophène et l’autisme. Les escrocs du bien-être et les idéologues pseudoscientifiques ont manifestement l’oreille de certains politiciens.
Nous avons vraiment de la chance, au Sénat, de compter parmi nous des collègues ayant une formation médicale qui déploient des efforts inlassables pour informer les Canadiens sur les fondements scientifiques de la médecine moderne et sa pratique, ainsi que pour contrer la désinformation et la mésinformation, dont le ton négatif et l’intensité ne cessent de s’accentuer.
Chers collègues, la Loi sur le cadre fédéral relatif au trouble du spectre de l’autisme, habilement parrainée par un autre défenseur passionné, le sénateur Housakos, a reçu la sanction royale en mars 2023. Parmi ses dispositions figurait la création d’un réseau national de recherche et de campagnes de sensibilisation du public.
En réponse, le gouvernement a lancé une stratégie nationale sur l’autisme qui reposait sur une seule conférence et ne prévoyait aucun financement pour la mise en œuvre de la loi.
Les associations d’autistes et les personnes défendant leur propre cause avaient des attentes plus élevées, tout comme ceux d’entre nous qui suivaient de près les résultats.
Tout l’intérêt de cette mesure législative était de donner au gouvernement fédéral la base juridique nécessaire pour créer des initiatives fédérales en matière d’autisme.
Dans le tourbillon de désinformation et de mésinformation, je crois, en tant que parent d’un fils autiste dans la mi-trentaine, que la nécessité pour les gouvernements — y compris le nôtre — d’agir pour sensibiliser le public à l’aide de campagnes factuelles fondées sur la science et de dénoncer la désinformation et la mésinformation dans le domaine médical n’a jamais été aussi grande.
En bref, les individus, les familles et les femmes enceintes devraient continuer à suivre les conseils de leurs prestataires de soins de santé, et non ceux de politiciens aux intentions douteuses.
Merci.
Des voix : Bravo!
[Français]
Visiteurs à la tribune
Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Son Excellence Margriet Vonno, ambassadrice du Royaume des Pays-Bas au Canada, et de Robert Peck, ancien ambassadeur canadien auprès de la République démocratique populaire d’Algérie. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Henkel.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
[Traduction]
Le Mois de la sensibilisation au cancer infantile
L’honorable Robert Black : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au Sénat pour rendre hommage à Maggie, Hannah, Cameron et Peter, ainsi qu’aux innombrables autres personnes touchées par le cancer infantile. Alors que nous entamons le mois d’octobre, je tiens à souligner que le Mois de la sensibilisation au cancer infantile s’est terminé le 30 septembre.
Le cancer infantile est la principale cause de décès lié à la maladie chez les enfants au Canada, près de 1 000 enfants étant diagnostiqués chaque année. En septembre dernier, des Canadiens aux quatre coins du pays ont porté le ruban doré en l’honneur de tous les enfants et de toutes les familles touchés par le cancer infantile, ainsi que des professionnels de santé et des chercheurs qui se consacrent à la lutte contre cette maladie.
Chers collègues, en août dernier, je vous ai envoyé à chacun une lettre accompagnée d’un ruban doré à porter afin de promouvoir le Mois de la sensibilisation au cancer infantile et de contribuer à la prise de conscience sur ce sujet. Comme je l’ai mentionné dans ma lettre, l’or est un métal précieux, tout comme nos enfants sont notre trésor le plus précieux.
Je tiens à remercier chacun d’entre vous qui avez porté cette épinglette au cours du mois de septembre afin de manifester votre soutien et de sensibiliser le public à la cause de ces enfants et de leurs familles. J’aimerais partager avec vous un message de remerciement que j’ai reçu plus tôt ce mois-ci de la part de Childcan : « Votre soutien contribue à mettre leur expérience en lumière et leur rappelle qu’ils ne sont pas seuls. »
Malgré toutes les difficultés auxquelles ils doivent faire face, ces enfants font preuve d’une force, d’une résilience et d’une foi inébranlable dans leur avenir qui sont tout simplement remarquables. Ce sont de véritables superhéros, et je suis inspiré par la bravoure et le courage dont ils font preuve face à l’adversité.
Chaque année, des enfants et leur famille voient leur vie complètement chamboulée. Soudainement, leurs journées sont remplies de visites à l’hôpital, de rendez-vous chez le médecin et d’interventions médicales. Heureusement, de nombreuses organisations comme l’Œuvre des Manoirs Ronald McDonald et Childcan se dévouent à aider ces enfants et leur famille à obtenir un diagnostic, des traitements et d’autres services.
L’Œuvre des Manoirs Ronald McDonald aide les familles qui doivent se déplacer pour obtenir des traitements pour leur enfant malade en veillant à ce que les membres de la famille puissent rester ensemble pour se soutenir mutuellement en cette période difficile. D’autres organismes comme Childcan viennent spécifiquement en aide aux familles et aux enfants qui luttent contre le cancer, et ce, dès qu’ils reçoivent le diagnostic. Ils financent la recherche et offrent une aide financière, du soutien affectif et des programmes sociaux pour alléger une partie du fardeau qui pèse sur ces familles afin qu’elles puissent prendre soin de leurs enfants.
Je remercie tous les travailleurs dévoués de partout au pays qui changent la vie de ces familles de façon considérable. Nous devons veiller à ce que les organismes comme Childcan et l’Œuvre des Manoirs Ronald McDonald continuent de recevoir l’aide nécessaire pour continuer d’offrir du soutien aux enfants et de permettre aux familles de prendre soin de leur enfant malade.
Le mois de septembre vient de se terminer, ce qui marque la fin d’un autre Mois de la sensibilisation au cancer infantile, mais le cancer pédiatrique ne s’arrête pas à la fin du mois. Il faut continuer à sensibiliser le public à cette maladie afin de favoriser davantage d’investissements dans la recherche et de réduire le nombre d’enfants qui nous quittent beaucoup trop tôt à cause du cancer infantile.
Merci. Meegwetch.
Des voix : Bravo!
L’enquête de la GRC à Montréal
L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, j’ai une mise à jour à vous communiquer concernant les postes de police chinois à Montréal : ils n’existent pas.
La semaine dernière, la GRC a conclu son enquête sur le Service à la famille chinoise du Grand Montréal et le Centre Sino-Québec de la Rive-Sud sans recommander de poursuites.
Pendant plus de deux ans, le Service à la famille chinoise du Grand Montréal et le Centre Sino-Québec de la Rive-Sud ont été publiquement soupçonnés en raison d’allégations irresponsables de la GRC, qui ont entraîné des compressions du financement, des réductions massives de personnel et même la menace de saisie de leur établissement communautaire. Au-delà des répercussions opérationnelles immédiates, les atteintes à la réputation ont suscité la peur, la méfiance et la stigmatisation au sein des communautés racisées, qui ont vu à quel point des institutions établies de longue date pouvaient être facilement discréditées par les accusations et les insinuations d’organismes gouvernementaux puissants — et pas seulement d’organismes gouvernementaux, mais aussi de parlementaires.
(1420)
Au Sénat et à l’autre endroit, des sénateurs et des députés ont parlé de ces deux organisations comme si elles étaient coupables, alors qu’aucune accusation n’avait même été portée. Dans la frénésie de l’hystérie liée à l’ingérence étrangère qui s’est emparée de notre pays au cours des cinq dernières années — et 103 ans après la Loi sur l’exclusion des Chinois —, nous autorisons à nouveau une forme de discrimination. Cette fois-ci, elle ne vise pas tous les Chinois, mais les Canadiens d’origine chinoise aux antécédents, aux opinions et aux affiliations qui déplaisent. Chers collègues, c’est de l’exclusion moderne.
Non seulement la GRC n’a jamais porté d’accusations et a fait traîner son enquête pendant plus de deux ans, mais elle n’a jamais expliqué quelles étaient, selon elle, les activités répréhensibles qui se déroulaient à Montréal. Il est honteux que, même aujourd’hui, alors que l’enquête est terminée et qu’aucune accusation n’a été portée, la GRC n’ait pas présenté d’excuses aux deux organisations, sans parler d’une indemnisation.
La grande ironie, dans ce cas-ci, c’est que les soi-disant renseignements qui ont mené à l’enquête sur l’ingérence étrangère venaient d’une ONG en Espagne et qu’ils avaient une provenance douteuse. Est-ce que la GRC enquêtera maintenant sur Safeguard Defenders à la suite de son ingérence étrangère au Canada et des préjudices causés à la communauté chinoise à Montréal?
Dans la foulée du projet de loi C-70 et de la nomination imminente d’un commissaire à la transparence en matière d’influence étrangère, nous devons être plus vigilants que jamais par rapport à la discrimination, à la stigmatisation et aux préjugés compte tenu de l’hystérie qui règne concernant l’ingérence étrangère et des abus dans le domaine de la sécurité nationale.
Ce n’est pas une question qui ne touche que les Canadiens d’origine chinoise. Récemment, la sénatrice Patterson a organisé une causerie avec Huda Mukbil, qui a fait part de ses réflexions sur son rôle de pionnière en tant que première musulmane arabo‑canadienne noire agente du renseignement auprès du Service canadien du renseignement de sécurité, et sur la discrimination systémique dont elle a été la témoin directe à la suite de la « guerre contre le terrorisme » qui a suivi le 11 septembre.
Je vous remercie.
AFFAIRES COURANTES
L’ajournement
Préavis de motion
L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 7 octobre 2025, à 14 heures.
[Français]
Projet de loi modifiant la Charte canadienne des droits des victimes et établissant un cadre de mise en œuvre des droits des victimes d’actes criminels
Première lecture
L’honorable Leo Housakos (leader de l’opposition) dépose le projet de loi S-236, Loi modifiant la Charte canadienne des droits des victimes et établissant un cadre de mise en œuvre des droits des victimes d’actes criminels.
(Le projet de loi est lu pour la première fois.)
Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?
(Sur la motion du sénateur Housakos, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)
[Traduction]
Affaires juridiques et constitutionnelles
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier les questions concernant les affaires juridiques et constitutionnelles en général
L’honorable David M. Arnot : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, conformément à l’article 12-7(9) du Règlement, soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les questions qui pourraient survenir occasionnellement concernant les affaires juridiques et constitutionnelles en général;
Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 10 octobre 2027.
Affaires sociales, sciences et technologie
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier des questions relatives aux répercussions de l’intelligence artificielle
L’honorable Rosemary Moodie : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, des questions relatives aux répercussions de l’intelligence artificielle au Canada, en insistant sur les points suivants :
a)la souveraineté et la gouvernance des données;
b)l’éthique, la protection des renseignements personnels et la sécurité;
c)les risques, les avantages et les effets sur la société;
Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès de la greffière du Sénat, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat;
Que le comité soumette son rapport final au Sénat sur son étude au plus tard le 31 décembre 2026 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.
[Français]
Banques, commerce et économie
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier la crise du logement et les défis auxquels sont actuellement confrontés les constructeurs immobiliers et à renvoyer les documents reçus et les témoignages entendus pendant la première session de la quarante-quatrième législature
L’honorable Clément Gignac : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5a) du Règlement, je propose :
Que le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, la crise du logement au Canada et les défis auxquels sont actuellement confrontés les constructeurs immobiliers canadiens, en mettant particulièrement l’accent sur les taxes, les frais et les prélèvements gouvernementaux;
Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès de la greffière du Sénat, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat;
Que les témoignages entendus, les documents reçus et les travaux accomplis par le comité sur ce sujet, entre le 5 octobre 2023 et le 23 novembre 2023, durant la première session de la quarante-quatrième législature, sous l’ordre de renvoi concernant les banques et le commerce en général, soient renvoyés au comité;
Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 mars 2026 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.
[Traduction]
Son Honneur le Président intérimaire : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
L’honorable Hassan Yussuff : Votre Honneur, j’accepte le rapport de mon collègue, mais en tout respect, je crois que l’ordre de renvoi qu’il vient de citer au Sénat contient une erreur. Il a parlé de « constructeurs immobiliers canadiens », mais en tant que membre du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie, je crois savoir que les « constructeurs immobiliers » ne font pas partie de l’étude que nous voulons entreprendre.
[Français]
Le sénateur Gignac : Avec tout le respect que je dois à mon collègue le sénateur Yussuff, nous avons tenu lundi une réunion du sous-comité du programme et de la procédure. Le libellé exact de l’ordre de renvoi avait été présenté et approuvé par mes collègues membres du sous-comité. Nous avons ensuite fait parvenir l’ordre de renvoi spécifique que vous avez tous reçu. Les membres du comité l’ont tous reçu également.
Je dépose donc ce qui a été approuvé par le sous-comité du programme et de la procédure. Personne au Comité des banques ne m’a dit qu’il y avait un problème jusqu’à ce matin. Je dépose donc ce qui a été approuvé par le sous-comité du programme et de la procédure.
Son Honneur le Président intérimaire : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : Non.
Son Honneur le Président intérimaire : Le consentement n’est pas accordé.
(1430)
[Traduction]
L’honorable Percy E. Downe : Je croyais que nous avions déjà accordé notre consentement à cela avant l’intervention supplémentaire.
Son Honneur le Président intérimaire : D’après ce que j’ai entendu, sénateur, comme le sénateur Yussuff a pris la parole et a posé des questions, il n’était pas clair que celui-ci ait été accordé.
Le sénateur Gignac : Le comité directeur a tenu une séance à huis clos pour discuter de ce qu’il voulait étudier, et le comité a décidé que nous allions nous pencher sur le logement. Conformément aux pratiques exemplaires du Sénat, nous avons un ordre de renvoi général, mais nous avons également un ordre de renvoi précis sur le logement.
Le comité directeur s’est réuni lundi avec le greffier. Nous avons alors déposé exactement le même ordre de renvoi que celui présenté aujourd’hui. Le greffier m’a confirmé, il y a quelques instants, qu’il s’agit bien du même document. Le comité directeur a donné son aval, et nous avons transmis l’ordre de renvoi à tous nos collègues du Comité des banques lundi. Tout allait bien jusqu’à ce qu’un collègue, aujourd’hui à midi, exprime soudainement un malaise quant au libellé de l’ordre de renvoi. Pour ma part, je suis d’avis que nous devrions aller de l’avant, mais la décision revient au Sénat.
[Français]
Son Honneur le Président intérimaire : Sénateur Gignac, voulez-vous donner un préavis pour la prochaine séance du Sénat?
[Traduction]
Le sénateur Gignac : C’est bon pour moi. Gardez simplement à l’esprit que la réunion du comité des banques sera annulée aujourd’hui si nous n’acceptons pas cet ordre de renvoi, car nous avons déjà des témoins et nous pensions que l’ordre de renvoi avait été accepté avant d’envoyer les détails de notre réunion d’aujourd’hui.
Pire encore, la réunion de demain sera également annulée, car elle précède la séance du Sénat. C’est au Sénat de décider, mais nous perdrons deux réunions cette semaine pour étudier la question du logement si le libellé de l’ordre doit être modifié aujourd’hui.
[Français]
Son Honneur le Président intérimaire : Par conséquent, honorables sénateurs, le texte que vous avez lu sera un préavis pour la prochaine séance du Sénat. Je vais relire le texte pour votre bénéfice.
[Traduction]
Que le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, la crise du logement au Canada et les défis auxquels sont actuellement confrontés les constructeurs immobiliers canadiens, en mettant particulièrement l’accent sur les taxes, les frais et les prélèvements gouvernementaux;
Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès de la greffière du Sénat, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat;
Que les témoignages entendus, les documents reçus et les travaux accomplis par le comité sur ce sujet, entre le 5 octobre 2023 et le 23 novembre 2023, durant la première session de la quarante-quatrième législature, sous l’ordre de renvoi concernant les banques et le commerce en général, soient renvoyés au comité;
Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 mars 2026 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.
[Français]
Il s’agit du préavis pour la prochaine séance du Sénat.
[Traduction]
Pêches et océans
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier les questions relatives au cadre stratégique actuel et en évolution du gouvernement fédéral pour la gestion des pêches et des océans
L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, conformément à l’article 12-7(13) du Règlement, soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les questions relatives au cadre stratégique actuel et en évolution du gouvernement fédéral pour la gestion des pêches et des océans du Canada, incluant la sécurité maritime;
Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 décembre 2027 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.
Sécurité nationale, défense et anciens combattants
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier les questions relatives à la sécurité nationale et à la défense en général
L’honorable Hassan Yussuff : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants, conformément à l’article 12-7(17) du Règlement, soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les questions qui pourraient survenir occasionnellement se rapportant à la sécurité nationale et à la défense en général, y compris les anciens combattants;
Que le comité soumette son rapport final au Sénat le 10 octobre 2027 au plus tard, et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.
PÉRIODE DES QUESTIONS
Les finances
Le soutien aux aînés
L’honorable Leo Housakos (leader de l’opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, c’est aujourd’hui la Journée nationale des aînés, une journée pour rendre hommage aux Canadiens âgés qui ont contribué à façonner notre grand pays. Or, un nouveau rapport montre que beaucoup d’entre eux ont plus de mal que jamais à gérer l’augmentation du coût de la vie. Un aîné sur trois continue de devoir subvenir aux besoins de ses enfants et petits-enfants. Quelque 76 % des aînés affirment qu’ils voient leurs économies fondre à cause de cela, ce qui représente une hausse de 11 % par rapport à l’année dernière. Plus de la moitié des aînés canadiens, qui sont de véritables héros, soutiennent qu’ils ne pourront pas survivre à la retraite.
Monsieur le leader du gouvernement, en cette Journée nationale des aînés, pouvez-vous garantir aux Canadiens et aux sénateurs ici présents que le gouvernement que vous représentez en fait assez pour que les aînés puissent prendre leur retraite dans la dignité et la sécurité plutôt que de continuer à vivre dans une anxiété croissante?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Les aînés ne doivent pas s’inquiéter : le gouvernement prend des mesures pour garantir la sécurité de tous les Canadiens et leur permettre de mener une bonne vie.
Le gouvernement déposera un budget le 4 novembre, et je suis convaincu que ces questions seront prises en considération à ce moment-là. Cela dit, il est très important que le gouvernement soit là pour tous les Canadiens, en particulier les aînés, car ce sont eux qui ont bâti le pays, et nous avons le devoir de leur assurer sécurité et tranquillité d’esprit.
Le sénateur Housakos : Sénateur Moreau, quand les deux tiers des aînés souffrent à la retraite parce qu’ils sont obligés d’aider financièrement leurs enfants, c’est parce que le gouvernement les a laissés tomber au cours des dernières années. Nous en sommes tous conscients.
Tout comme vous, j’ai bon espoir que le prochain budget prévoira des mesures concrètes à ce sujet. Vous semblez très optimiste, mais pouvons-nous avoir la garantie que le budget comprendra des mesures visant à résoudre le problème du coût de la vie et, surtout, à permettre aux aînés canadiens de bénéficier d’une retraite décente, comme ils le méritent, au lieu d’être obligés de subvenir aux besoins de leurs enfants et petits-enfants?
Le sénateur Moreau : Vous faisiez référence au logement, par exemple. Le gouvernement a lancé Maisons Canada, un nouvel organisme fédéral qui construira des logements abordables grâce à un investissement initial de 13 milliards de dollars afin de soutenir l’industrie, les autres pouvoirs publics, les communautés autochtones et les aînés. Le gouvernement s’engage à aider tous les Canadiens, y compris les aînés. Les aînés doivent pouvoir vivre en toute sécurité, et le gouvernement en est pleinement conscient.
L’innovation, les sciences et le développement économique
Les entrepreneurs canadiens
L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, selon une étude récente, seulement 32 % des entreprises canadiennes en démarrage et à fort potentiel étaient réellement basées au Canada l’année dernière, comparativement à plus de 67 % à la fin des années 2010. Bon nombre de nos entrepreneurs s’expatrient aux États-Unis, un phénomène que certains dans le secteur qualifient de « génération perdue ». Il ne s’agit pas seulement d’entreprises, sénateur Moreau; elles représentent la prospérité du Canada.
Après une décennie de politiques libérales qui ont fait obstacle à la croissance et qui ont fait fuir les investissements, comment les Canadiens peuvent-ils compter sur le gouvernement que vous représentez pour prendre des mesures concrètes en vue de garder nos meilleurs innovateurs et leurs entreprises ici au pays?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je crois comprendre que le gouvernement prévoit de bâtir l’économie la plus forte du G7. Ce faisant, il aidera non seulement les Canadiens, mais aussi les industries et les entrepreneurs canadiens en investissant dans la productivité et l’innovation et en faisant entrer davantage de Canadiens sur le marché du travail. Les entrepreneurs en général doivent savoir que le gouvernement a un plan sérieux qui vise à bâtir l’économie la plus forte du G7.
(1440)
La sénatrice Martin : Sénateur Moreau, le gouvernement dit souvent qu’il veut attirer des talents de partout dans le monde, et la récente augmentation des frais du visa états-unien H-1B pourrait représenter une occasion pour le Canada.
Comment les Canadiens peuvent-ils faire confiance au gouvernement pour attirer des innovateurs de l’étranger alors que nos propres entrepreneurs croulent sous le poids des formalités administratives et des politiques non concurrentielles du Canada?
Le sénateur Moreau : Bâtir une économie forte pour le Canada aide les entrepreneurs, et c’est pourquoi les entrepreneurs canadiens peuvent avoir l’assurance que le gouvernement est tourné vers l’avenir. Bâtir une économie forte aide les Canadiens et l’industrie canadienne, et c’est exactement ce que fait le gouvernement actuel. Par conséquent, les entrepreneurs pourront recruter de la main-d’œuvre au Canada et ailleurs dans le monde.
Les relations Couronne-Autochtones
La réconciliation avec les peuples autochtones
L’honorable Nancy Karetak-Lindell : Bonjour.
En 2015, le gouvernement du Canada s’est engagé à travailler en partenariat avec les peuples autochtones pour faire progresser la réconciliation. Une décennie plus tard, il demeure essentiel d’investir à long terme dans la sécurité alimentaire, les infrastructures, le logement et les aides en matière de santé mentale, en particulier pour les personnes qui vivent dans les communautés éloignées. Ce n’est pas seulement une question de politique; il s’agit de défendre les droits des Autochtones, l’équité et les engagements pris par le Canada dans le cadre de la Commission de vérité et réconciliation et conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
Avec des programmes ponctuels, comme Initiative : Les enfants inuits d’abord, qui doit prendre fin en mars 2026, et les pressions de plus en plus fortes qui pèsent sur les dépenses fédérales, quels sont les plans du gouvernement du Canada pour s’assurer que les communautés autochtones ne sont pas laissées pour compte?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour cette question.
En ce qui concerne les Autochtones, les Métis et les Inuits, c’est quand le gouvernement crée de véritables partenariats avec les communautés et les parties intéressées que l’on trouve des solutions pratiques pour faire réellement progresser les projets et les dossiers prioritaires. Le gouvernement actuel a signé un accord historique de 10 ans avec l’Association nationale des sociétés autochtones de financement. Cet accord prévoit 5 millions de dollars pour soutenir les entreprises et les entrepreneurs autochtones, en particulier les femmes et les jeunes. Le gouvernement poursuivra les démarches en vue d’éliminer les obstacles à la participation économique afin de bâtir un avenir où chacun a des chances égales de réussir.
Il s’agit d’un engagement envers les Autochtones au pays.
La sénatrice Karetak-Lindell : Comment le gouvernement garantira-t-il le maintien de ces mesures de soutien au-delà des cycles de financement temporaires et de façon à faire progresser de manière réelle et significative la réponse aux 94 appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation sans délai?
Le sénateur Moreau : Le gouvernement a décidé qu’il était très important de travailler avec les Autochtones et toutes les communautés du Canada.
Le gouvernement a mené à bien ou a fait progresser 85 % des réponses aux appels à l’action visant le gouvernement fédéral en ce qui concerne le Conseil national de réconciliation, et il a mis en place les conditions nécessaires pour soutenir la réponse aux appels à l’action nos 54 à 56. Le gouvernement travaille avec les Autochtones. Il s’est également engagé en faveur de la réconciliation économique.
La sécurité publique
Le nombre disproportionné d’Autochtones incarcérés
L’honorable Kim Pate : Merci, monsieur le représentant du gouvernement.
Lors de la dernière Journée nationale des peuples autochtones, l’ancien représentant du gouvernement a réitéré l’engagement du gouvernement à lutter contre la surreprésentation des Autochtones dans les prisons. Dans le cadre de l’appel à l’action no 30 de la Commission de vérité et réconciliation, le gouvernement s’est engagé à éliminer cette surreprésentation d’ici cette année, voire d’ici hier.
L’incarcération massive reste l’un des héritages les plus marquants des pensionnats autochtones et d’autres politiques coloniales de séparation forcée et d’institutionnalisation. Quelles mesures urgentes le gouvernement prendra-t-il pour mettre fin aux taux d’incarcération actuels des Autochtones, et en quoi ces efforts différeront-ils des approches adoptées au cours des 10 dernières années, notamment celles de la Stratégie en matière de justice autochtone, qui n’ont fait que perpétuer et exacerber la surreprésentation des Autochtones dans les prisons, à tel point qu’une femme sur deux et un homme sur trois dans les prisons fédérales sont autochtones?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Sénatrice Pate, merci de votre question. Je vous en suis reconnaissant et je vous remercie de votre engagement envers cette question importante, que vous n’hésitez pas à soulever au nom des personnes concernées.
Je tiens à être clair : la surreprésentation des Autochtones dans le système de justice pénale, en tant que victimes ou que délinquants, est un problème grave et complexe qui trouve ses racines dans le racisme systémique et l’héritage du colonialisme, et le gouvernement est déterminé à s’attaquer à ce problème.
Je ne manquerai pas de faire part de cette préoccupation à la ministre concernée et je vous remercie d’avoir soulevé cette question ici, au Sénat.
La sénatrice Pate : Merci beaucoup. Je vous en suis reconnaissante.
À l’heure où le gouvernement met l’accent sur une gestion rigoureuse des dépenses publiques, comment justifie-t-il les coûts financiers et les résultats en matière de sécurité publique liés à l’incarcération massive des Autochtones? Ne pourrait-il pas accomplir davantage en réorientant ces ressources vers les services destinés aux communautés autochtones, notamment dans les domaines de la santé, du logement, de l’éducation, du soutien social et du revenu, afin de lutter contre la marginalisation et ainsi prévenir la victimisation et la criminalisation?
Le sénateur Moreau : Sénatrice Pate, si vous me le permettez, je vais répéter les propos tenus hier par le premier ministre sur ce que fait le gouvernement. Il a notamment dit que :
Nous bâtissons ensemble – dans les domaines des soins de santé, du logement, de l’éducation et des opportunités économiques –, tout en défendant les droits des Autochtones et en donnant aux communautés les moyens d’assurer leur sécurité et leur prospérité.
Les propos du premier ministre traduisent une volonté réelle de progresser sur ces dossiers essentiels. Merci d’avoir soulevé la question.
L’environnement et le changement climatique
L’Agence canadienne de l’eau
L’honorable Flordeliz (Gigi) Osler : Sénateur Moreau, l’eau douce est essentielle à la survie des espèces et des sociétés. L’eau douce est une ressource limitée, et le Canada, qui compte 20 % de l’approvisionnement mondial, a une responsabilité particulière de la protéger.
L’Agence canadienne de l’eau a été créée pour assurer un leadership national en matière de protection, de gestion et de conservation de l’eau douce. Les scientifiques et les experts nous préviennent que les rumeurs de compressions budgétaires à l’Agence canadienne de l’eau, si elles s’avéraient, feraient obstacle aux travaux de restauration des eaux vulnérables, ce qui mettrait en péril l’eau potable, des écosystèmes et des économies locales.
Sénateur Moreau, le gouvernement peut-il assurer aux Canadiens que l’Agence canadienne de l’eau disposera des ressources nécessaires pour assurer la propreté et la bonne gestion de notre eau douce pour les générations actuelles et futures?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question, sénatrice Osler. Vous savez — comme tous les sénateurs — que je ne peux pas faire de commentaires sur d’éventuelles dépenses ou compressions.
Cela dit, je suis convaincu que le gouvernement protégera toujours notre eau. Il s’agit de l’une des ressources importantes du Canada, et il ne fait aucun doute que le gouvernement s’est engagé à la protéger.
La sénatrice Osler : Le mandat de l’Agence canadienne de l’eau couvre la gestion des écosystèmes d’eau douce, mais elle ne se penche pas spécifiquement sur la sécurité de l’approvisionnement en eau dans le contexte plus vaste de la sécurité nationale.
Les changements de politiques aux États-Unis et les compressions budgétaires exerceront des pressions sur les traités transfrontaliers bien établis relatifs à l’eau, comme le Traité du fleuve Columbia et l’Accord relatif à la qualité de l’eau dans les Grands Lacs.
Quel est le plan du gouvernement pour protéger les réserves d’eau douce du Canada afin d’en garantir l’abondance et la sécurité?
Le sénateur Moreau : Les Canadiens partagent bien plus qu’une frontière avec les États-Unis; nous partageons aussi à peu près le même environnement.
Le gouvernement continue de se concentrer sur ce qu’il peut contrôler. Cela comprend la gestion délicate d’un certain nombre d’enjeux communs, allant de la gestion transfrontalière de l’eau à la pollution atmosphérique en passant par la protection de la faune. Le Canada demeure déterminé à travailler avec ses partenaires américains pour faire progresser nos objectifs communs en matière d’environnement et de prospérité économique, tout en agissant d’une manière lucide et conforme aux attentes des Canadiens dans les domaines où nos priorités ne concordent pas. De plus, les Canadiens s’attendent à ce que le gouvernement protège notre eau.
Les finances
La création d’emplois
L’honorable Andrew Cardozo : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.
Tout d’abord, monsieur, je tiens à vous féliciter pour vos nouvelles fonctions.
Ma question porte sur les dépenses fédérales et la création d’emplois.
(1450)
Avec 9 milliards de dollars consacrés aux dépenses de défense pour l’année en cours et les prochaines années, comment le gouvernement peut-il veiller à dépenser autant que possible pour développer l’industrie de la défense et créer des emplois au Canada plutôt que d’acheter du matériel prêt à l’emploi auprès d’autres pays?
Puis, lorsque nous devons acheter auprès d’autres pays, pouvons-nous nous assurer que ces pays effectueront des achats importants auprès du Canada à court terme, dans le cadre d’un accord réciproque? Par exemple, si nous achetons 1 milliard de dollars de matériel de défense, ils achètent 1 milliard de dollars de canola chez nous.
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Le gouvernement ne fera aucun compromis lorsqu’il s’agit de protéger les travailleurs et les entreprises d’ici, ce qui signifie acheter canadien.
Pour y arriver, le gouvernement veille à ce que les fournisseurs canadiens et leurs produits aient la priorité pour toutes les dépenses fédérales, et pas seulement dans les dépenses de défense. Cette nouvelle politique « Achetez canadien » s’appuie sur des mesures sectorielles visant à protéger notre souveraineté, à développer nos industries, à soutenir nos travailleurs et à bâtir une économie canadienne unifiée et forte.
En cette période de transformation, le gouvernement passe de la dépendance à la résilience. Il utilisera tous les outils à sa disposition pour construire en grand et avec audace, et pour bâtir l’économie la plus forte du G7, conformément aux attentes des Canadiens.
Le sénateur Cardozo : Merci. C’est encourageant. J’ai une question complémentaire. La semaine dernière, le gouvernement a annoncé un prêt de 500 millions de dollars à Algoma Steel. Il existe de nombreux exemples où les gouvernements fédéral et provinciaux ont accordé des subventions ou des prêts majeurs à de grandes entreprises qui, en fin de compte, n’ont pas réalisé leur investissement ou ont fini par verser des primes énormes à leurs dirigeants en l’espace de quelques mois. Si ces entreprises sont suffisamment désespérées pour accepter l’aide fédérale, ne devraient-elles pas l’être aussi suffisamment pour renoncer au versement de telles primes? Comment le gouvernement va-t-il s’assurer que cet argent servira à créer des emplois pour les travailleurs ordinaires?
Le sénateur Moreau : Sénateur Cardozo, l’industrie sidérurgique canadienne est essentielle à l’économie et à la sécurité du Canada. Elle soutient des dizaines de milliers d’emplois et elle stimule la croissance dans les secteurs de la fabrication, de la construction et de l’énergie.
Voilà pourquoi le gouvernement a mis en place des mesures ciblées, comme ce prêt, afin de soutenir l’industrie sidérurgique canadienne, de protéger les emplois canadiens et de renforcer la capacité industrielle nationale. En protégeant les emplois, nous protégeons aussi les travailleurs, leur famille et l’économie canadienne dans son ensemble.
Le Bureau du Conseil privé
Le bureau du représentant du gouvernement
L’honorable Denise Batters : Sénateur Moreau, le gouvernement Carney a augmenté le nombre de postes payés par les deniers publics au bureau du représentant du gouvernement. Maintenant, l’agente de liaison, comme vous l’appelez, a une agente de liaison adjointe. Que font ces personnes?
Selon le Règlement du Sénat, l’agent de liaison du gouvernement veille à la présence d’un nombre suffisant de sénateurs du parti au pouvoir pour assurer la tenue des votes, désigne des suppléants pour remplacer les sénateurs du gouvernement à des comités, et est responsable d’une sensibilisation qui n’est pas définie. Cependant, vous-même et le bureau du représentant du gouvernement, soutenez qu’il n’y a pas de sénateurs du gouvernement; votre agente de liaison n’a donc pas besoin de compter les votes, et elle est la seule sénatrice ministérielle qui siège à un comité, ce qui fait d’elle sa propre suppléante, je suppose.
De plus, personne au sein du groupe du gouvernement libéral ne semble en mesure de définir ce que l’on entend par « sensibilisation ». Voici ce qu’a dit votre ancienne leader adjointe : « [N]ous tenons des discussions avec divers sénateurs sur différents sujets [...] Ai-je une définition? Non [...] » Puisque les tâches qui incombent à l’agent de liaison du gouvernement sont tellement limitées, pourquoi avez-vous maintenant besoin de deux personnes au lieu d’une pour exercer ces fonctions?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : J’ai expliqué très clairement pourquoi nous augmentons à cinq le nombre de membres du Bureau du représentant du gouvernement. Premièrement, nous voulons représenter toutes les régions du Canada : le Canada atlantique, le Québec, l’Ontario, l’Ouest canadien et le Nord canadien. C’est la principale raison pour laquelle nous passons de trois à cinq membres. Ensuite, cela permettra à tous les sénateurs de communiquer plus efficacement et plus rapidement avec le bureau et, surtout, cela permettra au bureau de mener à bien ses activités.
Nous ne sommes pas seulement les représentants du gouvernement au Sénat, mais aussi les représentants du Sénat auprès du gouvernement. L’augmentation des capacités du bureau est une très bonne nouvelle pour tous les sénateurs.
La sénatrice Batters : Sur le site Web du Bureau du représentant du gouvernement, on peut lire que l’agente de liaison du gouvernement a la responsabilité de « [...] veiller à ce que les sénateurs disposent de toute l’information dont ils ont besoin en prévision des votes ». Pourtant, en juin, l’équipe du bureau n’a pas été en mesure de me dire à quoi le gouvernement libéral avait consacré les 73 milliards de dollars dépensés pendant la prorogation. Seuls les sénateurs conservateurs ont voté contre ces dépenses.
On trouve aussi sur le site Web du bureau une photo de vous avec le ministre MacKinnon et le premier ministre Carney, photo prise dans son bureau le jour de ce vote. Cette photo, où vous êtes radieux, a-t-elle été prise avant ou après que vous ayez voté en faveur de dépenses inexpliquées de 73 milliards de dollars?
Le sénateur Moreau : Nous devrons accepter d’être en désaccord sur la nature du Bureau du représentant du gouvernement.
J’ai expliqué très clairement ce que j’avais en tête en faisant passer le nombre de membres du bureau de trois à cinq : permettre de représenter au mieux le Sénat auprès du gouvernement et de représenter au mieux le gouvernement au Sénat.
En ce qui concerne la photo, vous savez que nous sommes photographiés tous les jours. Pour moi, le moment et le lieu où elle a été prise ne sont pas si importants. Mon principal...
[Français]
Les affaires mondiales
La gestion de l’offre
L’honorable Claude Carignan : Monsieur le leader, la question des quotas des producteurs de lait revient à l’avant-scène avec un article publié dans le Globe and Mail qui, selon des sources anonymes, nous a appris que le gouvernement étudiait la possibilité d’offrir un meilleur accès au marché canadien aux produits laitiers américains, afin d’adoucir les relations avec les États-Unis, semble-t-il.
Qu’est-ce que ce gouvernement est en train de manigancer dans le dos des producteurs de lait?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Tout d’abord, il ne faut jamais se fier aux rumeurs, sénateur Carignan, vous le savez; les rumeurs peuvent nous conduire à bien des endroits.
Le premier ministre a été tout à fait clair pendant la campagne électorale et le gouvernement demeure ferme. Pour tout ce qui concerne les quotas et la gestion de l’offre, le gouvernement canadien sera aux côtés des producteurs de lait, de volaille et d’œufs pour assurer la sauvegarde de la gestion de l’offre.
Je n’ai aucune information de coulisses et je ne me fie certainement pas aux rumeurs pour répondre aux questions.
Le sénateur Carignan : Eh bien, tant mieux; cela me rassure. D’ailleurs, c’est parce que je ne me fie assurément pas aux rumeurs que je pose des questions au représentant du gouvernement.
Toutefois, ce gouvernement a changé d’idée plusieurs fois, et il y a une différence entre ce qu’il a affirmé durant la campagne électorale et ce qu’il fait aujourd’hui en réalité. Comment les producteurs de lait du Canada et du Québec peuvent-ils être rassurés par votre réponse, alors que plusieurs sources anonymes laissent sous-entendre que le gouvernement est en train de mettre les quotas dans l’angle des négociations?
Le sénateur Moreau : Vraisemblablement, si les sources étaient fiables, elles ne seraient pas anonymes. En ce qui me concerne, je suis né sur une ferme laitière au Québec. Je connais l’importance de la gestion de l’offre, non seulement pour les producteurs de lait du Québec, mais aussi pour tous ceux qui y sont soumis au Canada.
Le gouvernement a été très clair sur le fait qu’il allait sauvegarder la gestion de l’offre et je n’ai aucune raison de croire qu’il change sa position pour quelque raison que ce soit.
[Traduction]
Les relations Couronne-Autochtones
L’accès à l’eau potable
L’honorable Bernadette Clement : Sénateur Moreau, hier, j’ai célébré la Journée de la vérité et de la réconciliation avec des amis d’Akwesasne et de Cornwall. Cependant, nous savons que la vérité et la réconciliation ne se limitent pas à la sensibilisation, à la célébration et à la communauté; il faut aussi agir.
L’ombudsman de l’Ontario, Paul Dubé, s’est récemment rendu dans la Première Nation de Neskantaga. Il a dit que certains enfants grandissaient sans jamais avoir connu l’eau potable du robinet. À cause du manque de logements, les familles s’entassent dans des maisons dont le sous-sol est infesté de moisissure noire dangereuse. Il a qualifié cette réalité de « bouleversante ». Que fait le gouvernement pour respecter ses engagements envers Neskantaga et les communautés qui connaissent des défis similaires?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Les engagements du gouvernement envers les peuples autochtones sont très importants. Je n’ai pas de réponse précise à la question que vous avez soulevée aujourd’hui, mais, chose certaine, quand nous travaillons avec les Premières Nations, avec les peuples autochtones, nous le faisons en gardant l’esprit ouvert afin de fournir aux Premières Nations ce dont elles ont besoin pour avoir de l’eau potable et pour prendre soin de leurs enfants.
Le gouvernement travaille très fort dans ce dossier. La réconciliation est un processus permanent qui doit absolument passer par la discussion et la collaboration avec les familles et les enfants autochtones.
La sénatrice Clement : Je vous remercie. J’ai l’intention de me rendre bientôt dans le Nord de l’Ontario. Il y a des sénateurs qui ont des liens avec cette immense région de notre province et qui défendent également les intérêts des communautés autochtones éloignées.
(1500)
Les grands centres urbains de l’Ontario sont bien représentés ici, mais d’autres voix ne se font pas entendre. Sénateur Moreau, le gouvernement s’engage-t-il à nommer un sénateur du territoire visé par le Traité no 9, soit le Traité de la baie James, afin que ses résidants soient mieux représentés au Sénat?
Le sénateur Moreau : Je suis désolé. Je ne peux pas répondre à cette question parce que la nomination des sénateurs est un privilège réservé au premier ministre. Si nous avons des discussions concernant les nominations au Sénat, je vais évidemment soulever la question auprès du premier ministre.
Le Bureau du Conseil privé
Le Bureau des grands projets
L’honorable Krista Ross : Sénateur Moreau, je vous félicite de vos nouvelles fonctions. Il est agréable de vous voir à l’œuvre sur les banquettes d’en face.
La première question que j’aimerais vous adresser en votre qualité de représentant du gouvernement concerne le Nouveau-Brunswick. Dans la liste des cinq projets d’intérêt national qui seront soumis à l’examen du Bureau des grands projets, dont le premier ministre a fait l’annonce il y a deux semaines, aucun n’est situé au Nouveau-Brunswick. La seule mention du Canada atlantique est le projet Wind West Atlantic Energy, qui figure dans la liste des « stratégies de transformation ».
Le Nouveau-Brunswick est prêt et dispose de ressources qui correspondent déjà aux priorités du gouvernement. Par exemple, on y trouve 21 des 34 minéraux critiques du Canada ainsi que 2 ports en eau profonde. Ma question est donc la suivante : envisage-t-on d’inclure des projets néo-brunswickois dans la prochaine série de projets qui seront soumis à l’examen du Bureau des grands projets?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Eh bien, je crains de ne pas avoir la réponse à cette question, mais une chose est certaine : la semaine dernière, j’ai mentionné que la liste des projets d’intérêt national n’était que la première. Il y en aura d’autres, et j’ai confiance qu’il y aura des projets partout au Canada, y compris au Nouveau-Brunswick.
Pour répondre directement à votre question, je n’ai pas de renseignements concernant un projet précis au Nouveau-Brunswick figurant sur les futures listes, mais je suis assez certain que les députés du Nouveau-Brunswick vont discuter de la situation avec les ministres. J’ai confiance qu’il y aura aussi un projet d’intérêt national au Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Ross : Merci, sénateur Moreau. J’aimerais que vous obteniez la réponse et que vous nous indiquiez, quand vous le pourrez, le moment de la prochaine série d’annonces. Je sais que mes collègues du Sénat du Nouveau-Brunswick et nos dirigeants néo-brunswickois — dont bon nombre nous ont rendu visite la semaine dernière en compagnie de notre première ministre — seront impatients d’obtenir ces renseignements.
Le sénateur Moreau : Je comprends l’importance de répondre à cette question. Je vais assurément soulever la question auprès du ministre, et quand il sera possible de vous informer du moment de la publication de la prochaine liste ou de l’inscription sur cette liste d’un projet concernant le Nouveau-Brunswick, je le ferai avec plaisir.
Le patrimoine canadien
Les droits des personnes 2ELGBTQIA+
L’honorable Kristopher Wells : Honorables sénateurs, dans sa première déclaration dans le cadre de ses nouvelles fonctions, le représentant du gouvernement a exprimé avec force la nécessité de veiller à ce que les droits et libertés consacrés dans la Charte ne soient pas remis en cause. Cela inclut bien sûr le droit à l’égalité pour tous les Canadiens, y compris les personnes 2ELGBTQI+. Des informations inquiétantes indiquent que le gouvernement de l’Alberta s’apprête à utiliser de manière préventive la disposition de dérogation pour passer outre ces protections essentielles.
Quelles mesures le gouvernement fédéral prendra-t-il pour protéger l’intégrité et les objectifs de la Charte des droits et libertés et veiller à ce que les Albertains 2ELGBTQI+ ne soient pas privés de leurs droits fondamentaux?
L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci, sénateur, d’avoir soulevé cette question importante. Je tiens à préciser que le gouvernement défendra toujours les droits de tous les Canadiens, y compris ceux de la communauté 2ELGBTQI+. D’ailleurs, le gouvernement du Canada a la responsabilité de défendre partout au pays la Charte des droits et libertés, qui fait partie intégrante de la Constitution. La Cour suprême du Canada est actuellement saisie des questions constitutionnelles que soulève le recours à la disposition de dérogation dans d’autres circonstances. Il ne serait donc pas opportun de m’étendre davantage sur le sujet, mais je suis certain que la Cour suprême du Canada rendra une décision dans un avenir proche.
Le sénateur K. Wells : Merci. Je reste profondément préoccupé par l’attaque sans précédent du gouvernement de l’Alberta contre les droits des personnes 2ELGBTQI+. Notre communauté compte sur le nouveau gouvernement fédéral pour continuer à être un allié et un défenseur des droits de la personne. La récente demande déposée par le gouvernement fédéral devant la Cour suprême est un premier pas majeur dans la défense de la Charte. Quelles mesures supplémentaires et concrètes — qu’elles soient juridiques, politiques ou autres — le gouvernement prendra-t-il néanmoins pour soutenir les communautés minoritaires, en particulier si le gouvernement de l’Alberta invoque la disposition de dérogation pour passer outre aux droits des personnes 2ELGBTQI+ garantis par la Charte?
Le sénateur Moreau : Je répète que le gouvernement défendra toujours les droits de la communauté 2ELGBTQI+, comme il le fera pour ceux de tous les Canadiens et pour la Charte canadienne des droits et libertés. Cependant, comme cette affaire est devant les tribunaux — et il s’agit de la Cour suprême du Canada, qui est la plus haute instance judiciaire du pays — et qu’un jugement sera rendu par la Cour concernant la disposition de dérogation, il serait inapproprié de ma part de faire d’autres commentaires à ce stade.
[Français]
ORDRE DU JOUR
Le discours du Trône
Motion d’adoption de l’Adresse en réponse—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,
Que l’Adresse, dont le texte suit, soit présentée à Sa Majesté le roi :
À Sa Très Excellente Majesté Charles Trois, par la grâce de Dieu, Roi du Canada et de ses autres royaumes et territoires, Chef du Commonwealth.
QU’IL PLAISE À VOTRE MAJESTÉ :
Nous, sujets très dévoués et fidèles de Votre Majesté, le Sénat du Canada, assemblé en Parlement, prions respectueusement Votre Majesté d’agréer nos humbles remerciements pour le gracieux discours que Votre Majesté a adressé aux deux Chambres du Parlement.
L’honorable Danièle Henkel : Honorables sénateurs, permettez-moi tout d’abord de vous exprimer toute ma gratitude pour l’accueil bienveillant et la sollicitude que vous m’avez accordés depuis mon arrivée. Sachez que je suis fière et honorée de partager cette Chambre avec vous.
En franchissant les portes du Sénat pour la première fois, je n’entrais pas seule : m’accompagnaient l’immigrante que je suis et qui a dû repartir de rien, le père disparu avant ma naissance, les sacrifices d’une mère courageuse, le deuil d’un époux qui m’a tant épaulée, et la mémoire d’un pays quitté dans la peur. Devant moi, là-haut, dans la tribune, il y avait mon tableau vivant : mes enfants et mes petits-enfants qui me rappelaient que j’étais là pour participer à bâtir un Canada plus équitable, plus juste.
Je ne suis pas venue au Canada par goût de l’aventure. Le 8 janvier 1990, j’ai pris un billet sans retour. J’ai fui la peur; dans mes valises, presque rien. Dans mon cœur, une certitude : mes enfants devaient avoir un futur. J’avais foi en une promesse; elle s’appelait le Canada.
[Traduction]
Or, une fois arrivés, une autre réalité nous attendait. Derrière cet accueil chaleureux se cachaient des portes closes. Le Canada semblait nous dire : « Attendez. Recommencez à zéro. Faites vos preuves encore et encore. » Par exemple, mon ex-mari, Ahmed, avait deux diplômes d’ingénieur, l’un en météorologie et l’autre en traitement de l’eau. Bien qu’il ait été choisi comme expert par l’Organisation mondiale de la santé pour diriger son bureau à Lausanne, au Canada, ses diplômes ont été considérés comme de simples bouts de papier sans valeur. Il a fini par vendre des rideaux au salaire minimum. Pour un homme de sa génération, qui s’était toujours considéré comme le pilier de la famille, cela a infligé une profonde blessure à sa dignité qui n’a jamais guéri.
[Français]
Quant à moi, je parlais quatre langues, j’avais étudié en relations internationales, et j’avais occupé plusieurs fonctions de direction. J’avais servi à l’ambassade des États-Unis en Algérie durant 10 ans. En 1989, le département d’État américain m’a désignée employée de l’année parmi toutes les ambassades du monde.
Pourtant, à mon arrivée, je n’ai eu accès qu’à de petits boulots : de la vente à domicile, des ménages et du secrétariat. Comprenez-moi bien, il n’y a rien de déshonorant dans ces métiers, c’était juste un énorme gâchis de compétences.
(1510)
Après 35 ans, une question me hante encore : comment notre pays peut-il laisser dépérir les talents dont il a tant besoin?
[Traduction]
La question de la reconnaissance des titres de compétences ne peut plus attendre. Nous connaissons tous des chirurgiens qui sont maintenant chauffeurs de taxi et des ingénieurs qui sont désormais vendeurs de chaussures. Cette main-d’œuvre qualifiée, dont notre économie a désespérément besoin, est ici même, mais nous continuons à ne pas en tenir compte.
Selon Statistique Canada, parmi les immigrants récents titulaires d’un diplôme universitaire, un sur quatre occupe un emploi qui ne correspond pas à ses qualifications. C’est plus du double du taux observé chez les Canadiens nés au pays. Même après 10 ans de résidence, un sur cinq occupe toujours un emploi pour lequel il est surqualifié. C’est insensé.
Dans le discours du Trône, le roi lui-même a réaffirmé la détermination du gouvernement à attirer des talents du monde entier pour soutenir l’économie. Cependant, si ces talents se heurtent à des portes closes une fois arrivés, à quoi bon les attirer ici?
[Français]
Nous créons nos propres blocages. L’OCDE rappelle que les mosaïques d’ordres professionnels, entre autres, et les barrières administratives limitent la mobilité, réduisent la concurrence et freinent l’innovation. En un mot, tout cela étouffe et ralentit notre économie.
Quand il m’a fallu tout recommencer, j’ai découvert une vérité simple : la dignité repose sur l’accès à un toit et à un emploi. Sans toit, chaque nuit devient une inquiétude. Sans emploi, chaque matin devient une humiliation. C’est pourquoi je soutiendrai toujours les politiques qui répondent à ces besoins fondamentaux.
Confrontée au refus de reconnaître mes compétences, j’ai dû créer mon propre emploi. Je suis donc devenue entrepreneure, non par rêve, mais par nécessité.
Vous comprendrez donc que je continuerai à porter ici, avec toute la passion qu’on me connaît, la voix des petites et moyennes entreprises, parce qu’elles sont l’oxygène de notre économie. Elles représentent 98 % des entreprises, et la moitié des emplois et du PIB. Pourtant, elles sont encore trop souvent écartées des grands projets, freinées par la bureaucratie et le manque de financement.
Que dire des entreprises dirigées par des femmes? Les obstacles sont encore beaucoup plus grands. Je le sais, je l’ai vécu. Aujourd’hui encore, tandis qu’on demande à un homme sa vision de la croissance., on demande à une femme si elle a un garant ou comment elle va concilier travail et famille. Quelle humiliation, dans un pays qui se veut champion de l’inclusion, de l’équité et de la diversité.
C’est pour cela que depuis 30 ans, je m’engage, à travers le Canada et à l’international, comme conférencière et conseillère stratégique afin de partager mon expérience, mais aussi mes outils, notamment avec les femmes et les populations marginalisées, pour les encourager à persévérer, à continuer de croire, de se former et d’innover.
[Traduction]
Dans un grand pays comme le nôtre, personne ne devrait être abandonné, car tout le monde est important et mérite une place dans notre société. Être des citoyens responsables ne peut que nous rendre plus forts et plus fiers.
C’est dans cet esprit que j’ai été choisie comme première lieutenante-colonelle honoraire du Régiment de Maisonneuve. Ces réservistes sont des citoyens-soldats. Ils jouent un rôle crucial dans notre protection civile en intervenant dans des situations comme les inondations, les incendies et les pandémies. Cependant, ils sont peu reconnus et peu soutenus. Derrière chaque réserviste se cache une famille qui doit s’adapter et une entreprise qui doit gérer cette double réalité. Je salue ces employeurs et demande que leur engagement social soit récompensé et soutenu.
[Français]
Pour moi, l’armée représente bien plus. C’est d’ailleurs le seul lien tangible avec ce père militaire que je n’ai pas connu et que j’ai cherché toute ma vie. L’absence est devenue héritage.
En juin 2025, en acceptant de devenir la première femme capitaine honoraire de la Garde côtière canadienne, j’ai voulu envoyer un autre message, particulièrement aux femmes : elles peuvent —et doivent —continuer de briser les plafonds de verre et d’occuper les fonctions auxquelles elles aspirent.
Chaque jour, je mesure le dévouement de ces femmes et de ces hommes qui veillent sur notre sécurité et je les en remercie.
Cependant, notre sécurité, chers collègues, ne se joue pas seulement là; elle se joue aussi en ligne.
Usurpation d’identité, ingérence étrangère, cyberattaques, vols de données : les menaces explosent. En juillet dernier, j’ai été victime d’une vidéo truquée générée par l’intelligence artificielle. Une imitation presque parfaite de mon image et de ma voix incitait à investir dans des produits frauduleux. C’est à ce moment que j’ai mesuré le grand vide juridique et la faiblesse des moyens de protection des citoyens et des entreprises.
D’ailleurs, la vérificatrice générale l’a rappelé en 2024 : le Canada accuse un retard stratégique et opérationnel en cybersécurité et en lutte contre la fraude. Pourtant nous ne manquons ni d’experts ni de talents.
Ce qui fait défaut, c’est la coordination, la volonté politique et la rapidité d’exécution. Les anciens projets de loi C-26, C-27 et C-63 doivent être mis à jour et redéposés d’urgence. L’Union européenne, le Royaume-Uni et l’Australie ont déjà mis en place des modèles efficaces. Pourquoi pas nous? Qu’attendons-nous? Il ne s’agit pas seulement d’enjeux techniques, mais bien de souveraineté politique et économique.
[Traduction]
En ce qui concerne la souveraineté économique, nous devons avoir le courage de nous pencher sur nos propres incohérences. Comment pouvons-nous parler de souveraineté quand il y a moins de restrictions au commerce avec les États-Unis qu’entre nos propres provinces et territoires? L’Union européenne a réussi à créer un seul marché qui couvre 27 pays et 24 langues, tandis que nous, les Canadiens, avons divisé notre pays en 13 petits marchés étroits. Selon des études récentes, c’est comme si nous imposions un droit de douane de 7 % aux entreprises qui font du commerce à l’extérieur de leur province ou de leur territoire. Je le répète : c’est insensé.
Il est grand temps que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux mettent de côté leur partisanerie et exploitent le potentiel de notre économie.
[Français]
L’ouverture de nos marchés intérieurs ne suffit plus : nous devons aussi déployer notre diplomatie économique. La Francophonie, par exemple, est une passerelle sans pareille vers de nouveaux marchés, du Québec aux Prairies, de l’Acadie aux territoires du Nord —comme à l’international. Sortons donc cette Francophonie du folklore!
(1520)
Puisque j’ai été ambassadrice de la francophonie économique durant trois ans, j’ai vu ce potentiel, qui représente un accès à un marché de 320 millions de personnes où nos entrepreneurs peuvent prospérer.
[Traduction]
Rien de tout cela ne portera ses fruits si nous ne faisons pas de l’éducation une priorité nationale. Nous devons rester à la pointe de la technologie et investir massivement dans le recyclage professionnel. Comme l’a dit John F. Kennedy : « Nos progrès en tant que nation dépendront de nos progrès en matière d’éducation ». Il a également dit : « L’esprit humain est notre ressource fondamentale. »
Les gouvernements, les entreprises, les citoyens, tout le monde doit avancer dans la même direction. Il faut aussi envoyer un message clair à la prochaine génération : votre talent est notre plus grand atout. Nous avons besoin de vous et nous croyons en vous.
Chers collègues, le chemin qui m’a menée ici a été long. Quitter mon pays a été un choix douloureux, mais je ne l’ai jamais regretté. Le Canada m’a accueillie, mais il m’a aussi mise à l’épreuve. Ici, j’ai connu l’insécurité, le doute et l’exil intérieur. Pourtant, petit à petit, à force de résilience, de sacrifices, d’échecs et de succès, j’ai retrouvé ma dignité et j’ai gagné la confiance de communautés et de mes pairs. Je les en remercie. Je continuerai humblement à faire de mon mieux pour faire entendre leur voix.
[Français]
Soyons lucides sur les défis d’aujourd’hui et de demain. C’est à nous tous, citoyens, gouvernements et entreprises, peu importe nos allégeances, d’y faire face ensemble.
Chers collègues, toutes mes actions, si différentes semblent-elles, ne sont que les branches d’un même arbre, portées par une même sève : celle d’un Canada qui permet à tous de participer à une œuvre commune, plus grande que nous-mêmes.
C’est avec vous que je souhaite la faire grandir.
Merci.
(Sur la motion de la sénatrice LaBoucane-Benson, le débat est ajourné.)
[Traduction]
Projet de loi sur le Mois du patrimoine ukrainien
Troisième lecture
L’honorable Stan Kutcher propose que le projet de loi S-210, Loi instituant le Mois du patrimoine ukrainien, soit lu pour la troisième fois.
— Honorables sénateurs, je prends la parole pour lancer le débat à l’étape de la troisième lecture de ce projet de loi. Permettez-moi, en premier lieu, de saluer le soutien des sénateurs tout au long du parcours de ce projet de loi au Sénat.
Je tiens également à souligner les contributions de tous ceux et celles qui ont pris la parole et enrichi notre réflexion sur l’importance d’instituer un mois consacré au patrimoine ukrainien.
Je remercie tout particulièrement la sénatrice Batters, la porte-parole bienveillante du projet de loi. La semaine dernière, son discours à l’étape de la deuxième lecture, a éloquemment illustré de nombreux aspects de la richesse du patrimoine ukrainien.
Je serai bref. J’ai parlé de ce projet de loi avec des Ukrainiens ici au Canada et en Ukraine. Qu’ils soient établis au Canada depuis longtemps ou récemment arrivés, tous ont remercié le Sénat pour cette initiative. Pour les nombreux Ukrainiens qui vivent les horreurs de la guerre au quotidien, ce projet de loi est porteur d’espoir : il montre que le Canada est là, qu’il soutient l’Ukraine dans son combat vers la victoire et qu’il sera présent pour l’aider à se reconstruire une fois la paix revenue.
Par un heureux hasard, c’est aujourd’hui la Journée des défenseurs de l’Ukraine, un jour férié visant à rendre hommage aux anciens combattants et aux soldats tombés au front des forces armées ukrainiennes. Cette journée nous rappelle que l’Ukraine se bat non seulement pour elle-même, mais aussi pour défendre les valeurs chères aux démocraties du monde.
La sénatrice Batters a raison : j’aurais dû ajouter le mot « liberté » au préambule. En ukrainien, le mot « liberté » est cvoboda. L’héritage historique de ce mot remonte aux Cosaques et à leur lutte pour l’indépendance.
En ukrainien, le mot « indépendance » est nezalezhnist. En ukrainien, nezalezhnist signifie également se libérer de la tyrannie de la Russie, ce qui signifie que l’Ukraine peut exercer sa souveraineté, vivre en démocratie, respecter la primauté du droit à l’intérieur et à l’extérieur du pays, être reconnue comme membre estimé de l’Union européenne et de l’OTAN, et renforcer ses liens avec des pays aux vues similaires comme le Canada. Le Canada est prêt à renforcer ces liens en améliorant les relations entre les entreprises dans le cadre de l’Accord de libre-échange Canada-Ukraine, en renforçant la diplomatie culturelle, en répondant aux besoins militaires et en s’efforçant d’accélérer le retour des enfants volés par la Russie.
Parlant d’enfants, j’aimerais terminer mon discours par quelques observations sur les enfants, en particulier sur le chœur d’enfants ukrainiens d’Ottawa, qui a chanté au Sénat la semaine dernière. Chers collègues, saviez-vous que la sénatrice Ataullahjan a reçu tellement de câlins chaleureux de la part de ces enfants qu’elle en est encore rayonnante aujourd’hui? Il suffit de la regarder pour le constater.
La sénatrice McBean les a captivés avec son histoire olympique : elle a perdu une course contre l’Ukraine, mais a remporté tellement de médailles que les enfants ont perdu le compte.
Le sénateur Ravalia les a fait rire en prenant d’innombrables égoportraits avec eux.
La sénatrice Dasko les a accueillis chaleureusement.
La sénatrice Patterson les a emmenés à la Chambre où ils ont recréé des scènes de Harry Potter et appris comment fonctionne le Sénat. Chers collègues, j’ai cru comprendre que certains de leurs débats étaient de meilleure qualité que les nôtres.
Ce fut une soirée que ces enfants n’oublieront jamais. Malheureusement, au fur et à mesure qu’ils grandiront, ils n’oublieront pas non plus certaines choses qui sont déjà gravées dans leur mémoire.
Ces enfants sont originaires d’un grand nombre de villes et villages d’Ukraine, notamment de Boutcha et d’Irpin. L’un des jeunes membres de la chorale vient de Boutcha et, à cause des horreurs dont il avait été témoin, il était muet lorsqu’il est arrivé ici il y a quelques années. Aujourd’hui, ce jeune chante de tout son cœur au Canada, un endroit sûr où il peut se reconstruire.
Des voix : Bravo!
Le sénateur Kutcher : Honorables collègues, ces enfants font partie de ceux qui contribueront à perpétuer l’héritage de l’Ukraine ici, au Canada. Ces enfants sont tels qu’ils nous l’ont chanté : « Nous sommes le monde, nous sommes les enfants. Nous sommes ceux qui préparent un jour meilleur. » Ces enfants font partie de ceux que vous reconnaissez et honorez avec ce projet de loi.
Je vous remercie. D’akuju.
Des voix : Bravo!
L’honorable Donna Dasko : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour intervenir brièvement en appui au projet de loi S-210 du sénateur Kutcher, qui désigne le mois de septembre comme le Mois du patrimoine ukrainien, à l’étape de la troisième lecture.
Ce projet de loi est identique au projet de loi S-276 qui a été adopté par le Sénat lors de la 44e législature avant de mourir au Feuilleton plus tôt cette année.
(1530)
Je suis heureuse que le sénateur Kutcher ait présenté ce projet de loi à nouveau.
Je tiens à remercier tous mes honorables collègues qui ont assisté à notre événement historique la semaine dernière pour célébrer le Jour du patrimoine ukrainien au Sénat. Je remercie également mes coorganisateurs, le sénateur Kutcher et la sénatrice Patterson. Nous avons tous les trois été ravis de présenter la musique, la danse et la cuisine de l’Ukraine.
La communauté ukrainienne au Canada a des racines qui remontent à plus d’un siècle, quand plus de 170 000 Ukrainiens sont arrivés sur nos côtes, y compris mes propres grands-parents. C’était la première grande vague d’immigration au Canada avant 1914. Il est remarquable que la culture et le patrimoine ukrainiens soient restés si forts après tout ce temps.
J’ai beaucoup appris en étudiant les projets de loi S-210 et S-276 et en écoutant les discours remarquables de nos collègues les sénateurs Simons, Batters et Kutcher, ainsi qu’en consultant les archives historiques, qui contiennent des histoires de difficultés et d’exclusion, mais aussi d’intégration et de réussite.
Ce projet de loi reconnaîtra les importantes contributions apportées par les Canadiens d’origine ukrainienne au tissu social, économique, politique et culturel du Canada. Permettez-moi de vous donner un exemple : les Canadiens d’origine ukrainienne ont adopté et encouragé avec ténacité une vision du Canada comme société multiculturelle à un moment critique de l’histoire du pays, au moment où le sociologue John Porter décrivait le Canada comme une « mosaïque verticale », une hiérarchie rigide de groupes ethniques, et où la diversité n’était pas un objectif accepté. La communauté a persévéré, et son point de vue plus inclusif a fini par être adopté. En 1971, le Canada est devenu le premier pays au monde à adopter une politique multiculturelle, présentée par le premier ministre Pierre Elliott Trudeau. Les Canadiens d’origine ukrainienne peuvent être fiers, à juste titre, du rôle essentiel qu’ils ont joué dans cette avancée.
En reconnaissant le patrimoine ukrainien grâce à ce projet de loi, nous affirmons également la valeur de toutes les communautés ainsi que le respect et la reconnaissance que toutes les communautés cherchent pour leurs contributions à ce pays tout en continuant à bâtir une société meilleure et plus inclusive pour tous.
En Ukraine, aujourd’hui, la guerre brutale menée par Vladimir Poutine a entraîné de dures épreuves et des pertes de vie inutiles. Au moment où nous réfléchissons au patrimoine ukrainien, nous devons comprendre que la culture, l’art, la langue, les bibliothèques, les musées et les autres institutions culturelles de l’Ukraine sont des cibles que les Russes veulent absolument détruire aujourd’hui en Ukraine. Pour Vladimir Poutine, le patrimoine et l’identité de l’Ukraine doivent être éliminés.
En soutenant ce projet de loi, nous envoyons au monde entier le message que nous, Canadiens, nous soucions de cette communauté, que notre appui envers l’Ukraine et ses aspirations demeureront indéfectibles, aussi longtemps qu’il le faudra.
Je suis heureuse et fière d’appuyer le projet de loi S-210, Loi instituant le Mois du patrimoine ukrainien, et j’espère que vous aussi, vous l’appuierez. Renvoyons-le à l’autre endroit.
Merci, d’akuju.
L’honorable Paula Simons : Honorables sénateurs, dans mon bout de pays, en Alberta, le patrimoine ukrainien est omniprésent.
Au Canada, les premiers pionniers ukrainiens sont arrivés à Edmonton en juin 1892. Pendant toutes les années où l’Empire austro-hongrois, l’Empire russe et l’Union soviétique ont tenté de faire disparaître l’identité nationale et culturelle ukrainienne, la diaspora ukrainienne de l’Alberta a gardé la foi, littéralement. Cela dit, elle ne s’est pas contentée de construire des églises traditionnelles. Elle a préservé la nourriture ukrainienne, la danse ukrainienne, la poésie ukrainienne, la musique ukrainienne et la broderie ukrainienne. Elle a créé une capsule temporelle vivante, valorisant et protégeant la culture ukrainienne, en attendant le jour où l’Ukraine serait à nouveau libre.
Loin d’être assimilés, les Canadiens d’origine ukrainienne ont coopté tout le monde dans la culture ukrainienne. Ils ne nous ont pas uniquement appris à danser, à manger des dumplings et à colorier de beaux œufs. Ils nous ont enseigné le courage, la fidélité, la passion et la fierté. Ils ont entretenu un rêve — le rêve d’un pays libre — et nous ont tous convaincus de rêver avec eux.
Comme vient de l’expliquer la sénatrice Dasko, les Canadiens d’origine ukrainienne ont offert au Canada le cadeau du multiculturalisme, nous poussant à dépasser la binarité anglophone-francophone pour embrasser une véritable diversité culturelle. Ils nous ont montré qu’il était possible d’être un Canadien loyal et passionné, tout en restant passionnément fidèle à sa culture ancestrale.
Cela n’a pas toujours été chose facile. Les gens connaissent peut-être les fameuses statues qui célèbrent le patrimoine ukrainien en Alberta, comme le pierogi géant, le pysanka géant et la saucisse Mundare géante. Cependant, la plus importante statue ukraino-canadienne est d’un tout autre ordre. L’œuvre, intitulée Endurance, est un monument à la mémoire des 8 600 Ukrainiens et autres Européens de l’Est, des immigrants de l’Empire austro-hongrois, qui ont été internés parce qu’ils étaient considérés comme des ressortissants d’un pays ennemi pendant la Première Guerre mondiale. La plupart étaient de jeunes hommes, mais 81 femmes et 156 enfants ont également été emprisonnés dans ce qu’on appelait alors des camps de concentration; il y en avait 24 au Canada, dont 3 en Alberta.
Bon nombre de ces personnes étaient en réalité des réfugiés du régime austro-hongrois, mais le Canada, craignant que des traîtres se trouvent sur son territoire, les a enfermées et les a forcées à faire des travaux difficiles comme des travaux agricoles ou des travaux d’aménagement dans des parcs nationaux comme le parc Banff et le parc Jasper.
Le monument commémoratif de l’internement des Ukrainiens, qui se trouve sur le terrain de l’Assemblée législative de l’Alberta, a à ses côtés deux autres monuments tout aussi impressionnants : un monument à la mémoire des victimes et des survivants des pensionnats autochtones du Canada et un monument commémoratif de la Shoah et des victimes de l’Holocauste nazi. Ces trois monuments rappellent à la population et à ses dirigeants politiques les horreurs causées par les préjugés, la haine raciale, la paranoïa et la propagande.
Aujourd’hui, l’Ukraine est à nouveau assiégée. Vladimir Poutine, aidé par ses alliés nord-coréens, cherche à détruire la vaillante démocratie qui se trouve à ses portes. Pendant ce temps, Donald Trump et ses sbires masqués envoient de force les « étrangers » suspects dans des camps d’internement modernes, tandis qu’ici, au Canada, et surtout en Alberta, des politiciens lâches attisent les sentiments anti-immigrants.
Ainsi, en cette heure sombre, je remercie les générations de Canadiens d’origine ukrainienne qui se sont battus pour la liberté, pour la communauté et pour l’inclusion et qui ont montré à des générations comment être de véritables Canadiens.
Le Mois du patrimoine ukrainien devrait nous rappeler à tous de rester vigilants face à l’oppression et à la xénophobie, de nous prémunir contre ceux qui cherchent à nous diviser et de défendre nos alliés et un ordre international dans lequel la force ne fait pas loi.
Merci, hiy hiy.
Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)
Le Code criminel
Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat
L’honorable Yvonne Boyer propose que le projet de loi S-228, Loi modifiant le Code criminel (actes de stérilisation), soit lu pour la troisième fois.
[Français]
L’honorable Amina Gerba : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui avec une émotion profonde et un sens aigu de responsabilité à l’étape de la troisième lecture du projet de loi S-228, porté avec courage et détermination par notre collègue la sénatrice Yvonne Boyer.
Ce projet de loi est bien plus qu’un texte juridique. C’est un cri de justice. C’est une réponse à des décennies de souffrance silencieuse. C’est une reconnaissance claire du racisme systémique qui a infecté nos institutions de soins de santé.
(1540)
J’ai eu l’honneur de participer à l’étude sur la stérilisation forcée et contrainte au Canada en tant que membre du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Nous avons tenu de nombreuses audiences et entendu des dizaines de témoignages déchirants. Le courage de ces femmes venues nous raconter l’indicible mérite notre plus profond respect.
[Traduction]
Nous ne sommes pas là pour protéger les puissants. Nous sommes là pour défendre les personnes vulnérables.
[Français]
Au Sénat, notre devoir est clair : représenter les minorités et faire en sorte que les lois que nous adoptons soient équitables, inclusives et non discriminatoires. Nous comptons parmi les gardiens de la dignité humaine.
Pourtant, notre étude a révélé une vérité glaçante : la stérilisation forcée n’est pas une histoire du passé. Elle demeure une manifestation concrète du racisme systémique dans nos institutions de soins de santé.
Ce racisme ne se limite pas aux communautés autochtones. Il touche aussi les femmes racisées, les femmes marginalisées et les femmes handicapées.
Aujourd’hui, je vais vous raconter une histoire qui m’a profondément marquée et qui pourrait choquer, mais qui doit être entendue. Il s’agit de l’histoire d’une femme d’affaires bien éduquée, bien établie. Pendant des années, elle a souffert de douleurs menstruelles atroces accompagnées de saignements abondants. Un jour, elle a failli s’évanouir dans un aéroport international. De retour au pays, elle décide de consulter son gynécologue. Le diagnostic tombe : endométriose.
[Traduction]
On lui a dit qu’il existait une solution : une opération chirurgicale, un soulagement. Elle a fait confiance au système.
[Français]
On lui propose une opération pour retirer l’endomètre. Elle accepte. L’intervention se passe bien. Elle reprend sa vie, ses voyages, ses affaires.
Onze ans plus tard, lors d’un examen de routine, son médecin lui prescrit une échographie pelvienne. Le choc se produit alors : l’échographie révèle que son utérus a été retiré. Elle tombe des nues. Elle n’en avait jamais été informée. Elle croyait avoir subi une simple ablation de l’endomètre. L’hôpital le lui confirme par écrit : son utérus a bel et bien été retiré. Selon les documents reçus, elle aurait donné son consentement pour toute intervention nécessaire.
[Traduction]
Nécessaire pour qui? Nécessaire pour quoi? Elle a été stérilisée sans son consentement, à son insu et sans avoir été informée.
[Français]
Chers collègues, cette femme, c’est moi. C’est grâce à l’étude menée par le comité que j’ai compris ce que j’avais vécu. J’ai compris que j’avais été victime de stérilisation forcée. Je n’en avais jamais parlé auparavant.
J’ai compris que le racisme systémique ne fait aucune distinction, ni entre les femmes éduquées ou non ni entre celles qui sont fortunées ou non. Il nous touche toutes, femmes autochtones et racisées, parce que lorsque nous entrons dans le système de soins de santé ou le système de justice, nous sommes perçues d’une seule et même manière : avec suspicion, avec indifférence, avec trop peu de considération. D’ailleurs, cette attitude des services de santé a un nom : la misogynoire. En avez-vous entendu parler? C’est une double discrimination, à la fois sexiste et raciste, subie uniquement par les femmes noires. Ce terme peu connu a d’ailleurs été créé en 2008 par l’universitaire américaine Moya Bailey.
Selon Agnès Berthelot-Raffard, professeure adjointe à la Faculté de santé de l’Université York, l’une des conséquences de la misogynoire est la supposition selon laquelle les femmes noires peuvent davantage supporter la douleur que les autres. Ces discriminations sont inacceptables.
C’est pour défendre une véritable égalité au sein de tous dans nos systèmes de santé que j’ai choisi de témoigner aujourd’hui devant cette assemblée. Je parle pour briser le silence. Je parle pour mettre fin à ce racisme systémique. Je parle pour qu’aucune femme, plus jamais, ne découvre par hasard qu’on lui a retiré son utérus.
Le projet de loi S-228 est un pas essentiel vers la justice. Il reconnaît que la stérilisation sans consentement est une mutilation. Il inscrit dans le Code criminel que ces actes sont des crimes, point final.
[Traduction]
Honorables sénateurs, ce projet de loi ne se cantonne pas à des questions juridiques. Il porte aussi sur la dignité, la vérité et la guérison. Le projet de loi S-228 lutte contre le racisme systémique dans notre système de santé. Soyons la voix qui leur a été refusée. Soyons la justice qu’elles méritent.
[Français]
Chers collègues, je vous invite à voter en faveur de ce projet de loi pour qu’il soit renvoyé très rapidement à l’autre endroit, et ce, pour les femmes autochtones, pour les femmes racisées et pour toutes celles qui ont été réduites au silence.
[Traduction]
Votez en faveur de la justice et de la dignité. Votez en faveur du projet de loi S-228.
[Français]
Je vous remercie.
[Traduction]
L’honorable Yvonne Boyer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en tant que marraine du projet de loi S-228, qui vise à modifier le Code criminel afin de préciser que les procédures de stérilisation pratiquées sans consentement constituent des voies de fait graves.
Je tiens tout d’abord à saluer la sénatrice Gerba qui a vécu une expérience dévastatrice. Je vous remercie d’avoir eu le courage de prendre la parole et de nous raconter votre expérience aujourd’hui. Il est clair que ce projet de loi est non seulement important, mais également nécessaire pour nos enfants et les générations futures.
(1550)
Honorables sénateurs, ce projet de loi nous est présenté aujourd’hui grâce au travail minutieux et approfondi du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Le comité a étudié cette question avec diligence et compassion pendant deux législatures distinctes. Nous avons entendu des survivantes, des experts juridiques, des médecins, des sages-femmes et des représentants d’organisations nationales. Les témoignages étaient parfois déchirants, mais ils étaient aussi clairs et cohérents : la stérilisation forcée ou contrainte existe encore au Canada, elle doit cesser et la loi doit être renforcée pour y mettre fin.
L’étude menée par le comité a permis de transformer le projet de loi S-250 en une mesure législative simplifiée et mieux ciblée, que nous connaissons aujourd’hui sous le nom de projet de loi S-228. C’est grâce à ce travail que nous pouvons aujourd’hui aller de l’avant avec clarté et détermination.
Ce projet de loi poursuit le travail commencé il y a de nombreuses années, qui a déjà fait l’objet d’études et de débats et qui a été approuvé à l’unanimité ici même. En 2024, le Sénat a adopté le projet de loi S-250 amendé, avant qu’il ne meure au Feuilleton à l’autre endroit lorsque les élections ont été déclenchées.
Lorsque je parle de stérilisation sans consentement, bien des gens me demandent encore : « N’est-ce pas quelque chose du passé? » La réponse est non. Cela ne fait pas seulement partie du passé. Cela a encore lieu aujourd’hui au Canada. Cela se produit plus souvent que la plupart des Canadiens ne veulent bien le croire, et cela arrive à des personnes auxquelles on ne s’attendrait pas, comme nous venons de le voir.
Mon bureau est devenu un lieu de refuge pour les survivantes. Des femmes m’appellent en larmes. Certaines découvrent qu’elles ont été stérilisées seulement des décennies plus tard. D’autres m’appellent quelques jours après avoir accouché. Au cours des sept dernières années, j’ai parlé à des centaines de femmes. Il ne s’agit pas d’une antique pratique : cela se produit ici et maintenant.
Permettez-moi de vous parler de certaines des personnes derrière ces histoires.
Aujourd’hui, vous avez entendu la sénatrice Amina Gerba raconter son histoire poignante qui nous touche de près. Si une telle chose peut arriver à une sénatrice, elle peut certainement arriver à nos filles et à nos petites-filles.
Nicole Rabbit, sa mère et sa nièce ont toutes été stérilisées sans leur consentement. Elle nous a dit ceci sans détour :
Vous nous avez enlevé des générations. J’aurais pu avoir plus d’enfants. Ma fille aurait pu avoir plus de frères et sœurs [...] C’est comme si vous aviez effacé une génération.
Katy Bear, une jeune femme des Premières Nations de la Saskatchewan, a été stérilisée à 21 ans. Des années plus tard, malgré sa stérilisation, elle a eu une grossesse extra-utérine et a dû subir une intervention chirurgicale d’urgence. On lui a retiré la trompe de Fallope atteinte. Plus tard, elle a payé pour une intervention chirurgicale visant à reconstituer sa trompe restante et à en retirer le tissu cicatriciel.
Même si elle avait peu de chances de concevoir un enfant, elle est redevenue enceinte. Il y a six mois, en mars dernier, cette mère expérimentée craignait que son bébé, arrivé à terme, ne bouge pas assez. Elle s’est donc rendue à l’urgence. Dans une salle d’examen du même hôpital où elle avait été stérilisée 21 ans auparavant, l’obstétricienne traitante, qui est également professeure de médecine, lui a demandé son consentement pour qu’elle soit de nouveau stérilisée lors de la césarienne qu’elle allait subir prochainement. Imaginez le traumatisme qu’elle a dû revivre.
Louise Delisle n’avait que 15 ans lorsqu’elle a accouché en Nouvelle-Écosse. À son insu et sans le consentement de sa mère, le médecin lui a fait subir une hystérectomie partielle. Elle n’a découvert la vérité que des années plus tard, lorsque son mari et elle ont voulu fonder une famille. La décision de l’empêcher d’avoir d’autres enfants a été prise sans son consentement, à son insu et sans aucun égard pour son avenir.
Nous avons également entendu Sylvia Tuckanow, qui nous a raconté qu’après son accouchement, on l’a emmenée dans une salle d’opération et immobilisée pour la stériliser pendant qu’elle pleurait à chaudes larmes et suppliait les intervenants d’arrêter.
Honorables sénateurs, je tiens à saluer le Cercle des survivantes pour la justice reproductive. Cet organisme a été créé par des femmes déterminées qui ont subi une stérilisation forcée ou imposée sous la contrainte, mais qui ont refusé d’être réduites au silence. Pendant trop longtemps, on a parlé des survivantes sans toutefois parler avec elles.
Le Cercle des survivants a changé la donne. Il offre maintenant un espace sûr où les femmes peuvent discuter de leurs expériences, s’entraider et mener le combat pour la justice. Cet organisme n’est pas seulement un rassemblement de personnes ayant subi des préjudices, mais aussi un puissant moteur de changement. En s’unissant, les survivantes ont fait entendre une voix commune que les gouvernements et les institutions ne peuvent plus ignorer. Leurs témoignages devant les comités sénatoriaux nous ont tous émus, non seulement en raison de la douleur qu’elles portent en elles, mais aussi en raison de la force et de la clarté avec lesquelles elles appellent à l’action. Ce sont des femmes autochtones puissantes.
En tant que membre du conseil d’administration du Cercle des survivants, Nicole Rabbit nous a confié que lorsque les survivantes s’unissent, elles portent en elles la sagesse et la force de leurs mères et de leurs grands-mères, garantissant ainsi que leurs histoires ne peuvent être effacées.
Le Cercle des survivants nous rappelle que cette mesure législative n’est pas abstraite. Elle concerne des personnes réelles, des familles réelles et des générations qui ont été bouleversées à jamais. Le projet de loi S-228 est leur projet de loi. Il existe parce qu’elles l’ont réclamé, et nous leur devons de le faire adopter.
Le Cercle des survivants pour la justice reproductive cherche à créer un registre des personnes ayant subi cette procédure atroce. Il compte plus de 300 membres, et ce nombre augmente chaque jour, car d’innombrables autres personnes se manifestent. Beaucoup ne se manifesteront pas parce qu’elles sont trop traumatisées ou, pire encore, parce qu’elles ne savent pas qu’elles ont subi cette procédure et ne le découvriront pas avant des années.
Les cas de stérilisation forcée et sous la contrainte ne sont pas isolés. Ils sont le reflet d’un système qui a toujours dévalorisé le corps des femmes autochtones, des femmes noires, des femmes marginalisées, des personnes handicapées et d’autres personnes qui se trouvent en situation de vulnérabilité face à l’autorité. Ce sont les puissants contre les sans-pouvoirs.
Le projet de loi S-228 redonnera le pouvoir à celles dont on a trop longtemps fait fi et permettra aux communautés autochtones de travailler avec les professionnels de la santé afin d’élaborer de nouvelles approches en matière de soins adaptés à la culture et tenant compte des traumatismes.
Je tiens à souligner que ces préjudices n’appartiennent pas au passé. On m’a demandé d’enquêter sur une politique informelle en vigueur dans un système de santé du Nord et d’y mettre fin. Cette politique consistait à stériliser sans leur consentement toutes les femmes autochtones dès qu’elles devaient subir une intervention chirurgicale située entre les seins et les genoux.
Il y a aussi le cas du Dr Andrew Kotaska, un obstétricien réputé de Yellowknife et un ancien président de l’Association des médecins des Territoires du Nord-Ouest, qui, en 2019, a retiré les deux trompes de Fallope à une Inuite de 37 ans sans son consentement. Pendant l’opération, il a même déclaré : « Voyons si je peux trouver une raison d’enlever la trompe gauche. » Pour cette transgression, il a été suspendu 5 mois, il a été obligé de suivre un cours d’éthique et il a reçu une amende de 20 000 $. Il continue d’exercer la médecine. Le message qu’on envoie est donc le suivant : stériliser une femme autochtone sans son consentement est une erreur de jugement plutôt qu’un crime.
Certains demanderont pourquoi ce projet de loi est nécessaire alors que le Code criminel contient déjà des dispositions relatives aux agressions. En théorie, ces dispositions pourraient s’appliquer. En pratique, cela ne s’est jamais fait. Au Canada, aucun médecin n’a jamais été condamné au pénal pour stérilisation forcée, malgré des milliers de cas. Des poursuites civiles sont en cours, mais la justice civile ne peut à elle seule empêcher la prochaine stérilisation.
Les survivantes elles-mêmes nous ont dit, à l’unanimité et d’une seule voix, qu’elles veulent et ont besoin que cela devienne une infraction criminelle. C’est pourquoi le Comité sénatorial des droits de la personne a formulé sa première recommandation : modifier le Code criminel pour interdire expressément la stérilisation forcée. Le projet de loi S-228 est la réponse directe à cet appel.
Le projet de loi est simple et clair. Il ajoute à l’article 268 du Code criminel, qui traite des voies de fait graves, une disposition selon laquelle il est entendu que la stérilisation sans consentement est une forme de blessure ou de mutilation. Il s’agit d’une version simplifiée de l’ancien projet de loi S-250, passant de 55 à 14 lignes. Il garantit que les médecins agissant en cas d’urgence restent protégés par l’article 45. Enfin, il n’entrave pas l’accès volontaire à la stérilisation, aux soins d’affirmation du genre ou au choix en matière de procréation. Ce projet de loi n’est pas une question de politique. C’est une question de consentement et de dignité humaine.
Nous avons déjà fait le travail nécessaire. Le Sénat a examiné la question de manière approfondie. Le Comité des droits de la personne a publié deux rapports majeurs, et le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles a aussi étudié le sujet. Nous avons entendu les témoignages de survivantes, d’experts, de médecins, de sages-femmes, d’avocats et de l’une des nôtres. Les preuves sont accablantes. Le message des survivantes est toujours le même et il est urgent : il faut faire adopter le projet de loi, il faut de la reddition de comptes et il faut mettre fin à la situation.
Je tiens à prendre un moment pour remercier les membres du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles — aussi bien ceux de la présente législature que ceux de la précédente. Vous avez examiné attentivement le projet de loi S-250, vous avez entendu des témoignages difficiles et vous avez travaillé en collaboration pour peaufiner le texte législatif afin d’en arriver à la version claire et efficace qui nous est présentée aujourd’hui dans le projet de loi S-228. Grâce à votre travail, les préoccupations des survivantes, des experts et de vos collègues ont été pleinement prises en compte, et le projet de loi s’en voit renforcé.
Je tiens également à remercier le sénateur Wells, qui a toujours défendu avec ardeur la mesure législative. Sa volonté de parler sans détour de la nécessité d’agir et son insistance pour que le Parlement envoie un message sans ambiguïté ont joué un rôle déterminant dans l’avancement du projet de loi.
Chers collègues, chaque jour qui passe sans que le projet de loi soit adopté est un jour de plus où une personne au Canada risque d’être stérilisée contre son gré. Ce n’est pas théorique. Ce n’est pas symbolique. C’est une nécessité.
Nous avons écouté. Le projet de loi S-228 nous offre maintenant l’occasion d’agir et de veiller à ce que plus jamais personne dans ce pays ne soit privé du droit de décider s’il veut avoir des enfants, quand et comment. Rendons hommage aux survivantes, suivons les recommandations de nos propres comités et faisons enfin avancer ce projet de loi.
Toutes mes relations, meegwetch, merci.
L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Je tiens tout d’abord à remercier la sénatrice Gerba d’avoir eu le courage de partager son histoire personnelle, ainsi que la sénatrice Boyer pour son leadership et sa passion qui nous poussent à rectifier les erreurs.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, au nom du sénateur Wells (Terre-Neuve-et-Labrador), le débat est ajourné.)
(À 16 heures, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 4 juin 2025, le Sénat s’ajourne jusqu’à 13 h 30 demain.)